Quel Messin ne s’est jamais étonné de voir, le 3 février, le quartier d’Outre-Seille pris d’assaut par des hordes de pèlerins venus acheter quelques pains hérissés d’étranges petites pointes ? C’est qu’au centre du quartier se trouve l’église Saint-Eucaire, merveille d’architecture, où reposent quelques reliques de Saint Blaise.
D’après la Légende Dorée, véritable best-seller de la littérature médiévale dû au dominicain Jacques de Voragine, Blaise était évêque de Sébaste, une ville de l’actuelle Turquie. Pour échapper aux persécutions de l’Empereur romain Dioclétien, il aurait choisi de vivre en ermite, au fond d’une caverne d’Anatolie. Ravitaillé par tout un tas d’animaux qui venaient solliciter sa bénédiction, Blaise est finalement débusqué et conduit à la cour du gouverneur local. En chemin, il aurait guéri un enfant qui manquait de s’étouffer avec une arête de poisson. Un détail insignifiant en apparence mais qui déterminera l’un des principaux pouvoirs du saint.
Devant le gouverneur, Blaise refuse d’abjurer sa foi. Il est donc mis à mort à l’aide de peignes de fer. Sa peau est lacérée, déchirée. Puis, le pauvre évêque finit décapité. L’épisode de la guérison de l’enfant souffrant de l’arête de poisson aurait fait de Blaise un saint thaumaturge. On l’invoque traditionnellement contre les maux de gorge et les douleurs buccales. Plusieurs paroisses de Lorraine continuent d’ailleurs de célébrer, chaque 3 février, une messe en l’honneur de Saint Blaise. A cette occasion, chaque fidèle est invité à se présenter devant le prêtre qui, tenant deux cierges en sautoir contre le cou du fidèle, prononce une formule censée le protéger de tout mal de gorge.
Parce qu’elle conserve quelques reliques du martyr, l’église Saint-Eucaire, à Metz, attire chaque 3 février une foule de pèlerins venue, elle aussi, se prémunir des maux de gorges et autres trachéites. Pour cela, les fidèles n’hésitent pas à acheter aux commerçants qui, pour l’occasion, envahissent la Rue des Allemands, les fameux petits pains hérissés de piques. Venus de tout le Pays Messin et même parfois de plus loin encore, les fidèles se ruent sur ces petits pains et se font fort d’en ramener à toute leur famille. Certains, parmi les plus superstitieux, conservent même, toute l’année durant, un de ces petits pains au fond de leur armoire.
On raconte que ces pointes au sommet des pâtisseries rappelleraient les peignes utilisés pour mettre à mort le pauvre Blaise.