Vous l’avez certainement déjà remarqué, la Lorraine est riche de menhirs et de pierres dressées. Parmi celles-ci, on peut citer la Pierre au Jô qui se situe en pleine forêt, à l’Ouest du petit village de Norroy-lès-Pont-à-Mousson, le Menhir de la Dame Schone, près de Saint-Mihiel, ou encore la Pierre des douze apôtres à Meisenthal, aux confins de l’Alsace et de la Lorraine.
Mais de toutes ces pierres dressées, il en est une qui mérite une mention particulière. Pas en raison de sa taille, assez modeste au fond, mais en raison de l’histoire qu’elle incarne. La Hotte du Diable, à Milly-sur-Bradon, dans le département de la Meuse, est un menhir curieux. Il mesure trois mètres de haut, 1,80 mètre de large et environ soixante centimètres d’épaisseur. Des hypothèses, parfois totalement farfelues, ont été formulées au sujet de cette pierre. Les uns ayant prétendu qu’il s’agissait-là d’une borne milliaire romaine. Les autres ayant affirmé qu’au contraire, elle marquait la limite septentrionale de l’ancien Comté de Verdun. D’autres encore sont allés jusqu’à dire qu’il s’agissait là d’un débris rejeté par un volcan !
Chose curieuse, le menhir est recouvert d’une épaisse couche de ciment. Appliquée en 1922 sur ordre du conseil municipal de Milly-sur-Bradon, cette couche de ciment est destinée à masquer l’inscription, faite en 1917, par un certain Général von François, lointain descendant d’un huguenot émigré en Allemagne après la révocation de l’Edit de Nantes et qui, servant alors dans le VIIème Corps d’Armée, a fait graver sur le menhir, les mots suivants : « 843 – Karoliner Grenzstein Vertral von Verdun », c’est-à-dire « 843 – borne-frontière carolingienne du Traité de Verdun ». Un texte, mentionnant l’auteur de l’inscription, complétait le tout, avec une énorme croix de fer qui apparaît bien sur les rares photographies qui ont pu être prises du monument, entre 1917 et 1922.
Sans être bien-sûr la borne frontière du Traité de Verdun, cette curieuse Hotte du Diable demeure un témoignage unique de l’histoire mouvementée de la région. Dressé à une époque antédiluvienne, gravé par un soldat allemand en 1917 qui fait alors référence au traité signé à Verdun en 843, cimenté en 1922, le Menhir de Milly-sur-Bradon pourrait presque résumer, à lui seul, toute la complexité de l’histoire lorraine.
intéressant comme à chaque article de Mr GOEURIOT