Saint Remi est un personnage difficile à cerner. Aujourd’hui fêté le 13 janvier, jour anniversaire de sa mort, il était autrefois célébré le 1er octobre, sans que l’on sache trop pourquoi d’ailleurs. Notre région lui a consacré pas moins de 145 églises et lieux de culte. Pourtant, Remi n’avait rien de lorrain.
Né vers 437 dans un petit village situé près de Laon, Remi fit ses études à Reims, avant de devenir évêque de cette ville à seulement vingt-deux ans. Il est surtout célèbre pour avoir baptisé le Roi franc Clovis, à une date que les historiens situent entre 496 et 506. C’est au cours de cette cérémonie que Remi aurait prononcé la célèbre phrase, adressée à Clovis : « Courbe la tête, fier Sicambre. Adore ce que tu as brûlé et brûle ce que tu as adoré ». Hincmar, Archevêque de Reims du IXème siècle rapporte, dans sa Vita Remigii, qu’une colombe envoyée par le Saint-Esprit serait apparue, durant le baptême du guerrier Franc, afin de déposer une ampoule pleine du Saint-Chrême nécessaire à l’onction royale. C’est en mémoire de ce baptême, événement fondateur de la dynastie française, que la quasi-totalité des rois de France se feront sacrer à Reims.
Mort le 13 janvier 535, Remi fut inhumé à Reims, dans une petite église qui, à l’origine, était dédiée à Saint Christophe. En 852, l’Archevêque Hincmar procéda à l’élévation des reliques de son illustre prédécesseur. Ces dernières connaîtront ensuite un destin mouvementé, puisque le corps de Saint Remi sera transféré à Epernay pendant les invasions normandes, avant de revenir à Sainte-Marie de Reims, en 883.
Remi, dont le prénom, issu du latin Remigius, s’orthographie bien sans accent, a donc joui d’une étonnante popularité en Lorraine. La chose est d’autant plus étonnante que sa fête, célébrée chaque 1er octobre, était souvent synonyme, pour nos ancêtres, d’importantes dépenses. Traditionnellement en effet, c’est à la Saint Remi que l’on s’acquittait, au Moyen-âge, du cens, du champart et de tous ces impôts, souvent injustes, qui existaient en ces temps-là. Une charte, rédigée en juin 1280 par les moines de l’abbaye cistercienne de Saint-Benoît en Woëvre, nous en donne un exemple. Le document, écrit sur parchemin, note qu’une certaine Hawiette de Bouzonville reconnaît devoir à ladite abbaye une rente de quinze deniers, payable à la Saint-Remi.
Mais pourquoi payer les impôts au 1er octobre ? La raison, en fait, est toute simple. Dans un monde majoritairement agricole, où l’on s’acquittait parfois des redevances en donnant, au seigneur local, quelques poules, quelques setiers de blé ou autres quarterons de vin, l’impôt était prélevé dès que les récoltes étaient engrangées. Au 1er octobre en effet, le blé est au grenier et le vin est déjà en tonneaux. Le seigneur préférait retirer sa part avant qu’il ne soit trop tard. La tradition, en tout cas, a perduré jusqu’à nos jours car c’est toujours à l’automne qu’arrivent, dans nos boîtes aux lettres, ces douloureuses enveloppes qui réclament le paiement de la taxe foncière et de la taxe d’habitation.