Tantôt appelé Gengoult, Gengoulf, Gendulphe ou Gendulf, ce saint n’apparaît plus que dans nos anciens calendriers et almanachs. Pourtant, nos ancêtres lui vouaient un certain culte et il apparaît clairement que la Saint Gengoult représentait une sorte de marqueur temporel dans le calendrier agricole lorrain.
Commençons par présenter le personnage. D’après la tradition, Gengoult serait né au début du VIIIème siècle, dans une famille noble originaire de Champagne. Vers l’âge de vingt ans, il épouse Ganéa, une fille de l’aristocratie franque mais qui aime trop les hommes pour rester fidèle à son mari. Au retour d’une guerre menée aux côtés du Roi Pépin, Gengoult apprend les infidélités de sa femme. Comme cette dernière s’obstine à nier les faits, il décide de lui faire subir l’épreuve de l’eau. Il conduit donc sa femme près d’une source et lui demande de prendre une pierre au fond de l’eau. La femme adultère y plonge le bras et s’ébouillante.
Gengoult était fixé. Mais la femme, perfide, promet de se venger. Elle demande donc à son amant d’assassiner le pauvre Gengoult. Ce dernier meurt donc en plein sommeil, sous le glaive d’un amant jaloux. Nous sommes alors le 11 mai de l’an 760. Inhumé dans l’église de Varennes-sur-Amance, sur ses terres champenoises qu’il était censé administrer, le corps de Gengoult devient rapidement un but de pèlerinage. Son culte se répandit aux alentours pour gagner la Lorraine, où pas moins de 26 paroisses lui sont consacrées. La ville de Toul abrite également une collégiale dédiée à Saint Gengoult et dont le cloître est regardé comme l’une des merveilles du style gothique tardif en Lorraine.
Au regard de son hagiographie, rien d’étonnant à ce que Saint Gengoult soit devenu le patron des maris battus. Il était notamment invoqué autrefois pour la paix des ménages mais également, chose curieuse, contre les panaris. Le Docteur de Westphalen nous apprend que les maraîchers du Pays Messin avaient coutume de semer la salade le jour de la Saint Gengoult. La même date semble avoir servi de marqueur dans le calendrier agricole puisque plusieurs proverbes patois nous indiquent qu’il était préférable d’avoir sarcler les céréales avant la Saint Gengoult.
Westphalen, célèbre folkloriste du siècle dernier, nous conte également une belle histoire au sujet de Saint Gengoult. D’après lui, le saint aurait emprunté la route qui relie Metz à Saint-Avold. Arrivé à hauteur de Zimming, notre homme assoiffé se serait mis en quête d’un ruisseau ou de n’importe quelle source. Mais hélas, le vallon dans lequel il errait était sec. Il planta donc son bâton et fit une prière. Lorsqu’il retira le morceau de bois, une source d’eau vive se mit à jaillir. Gengoult but donc tout son saoul mais, en repartant, il oublia son bâton. Celui-ci aurait pris racine pour donner naissance à un chêne prodigieux, encore visible aujourd’hui. Au pied de l’arbre s’est construite une chapelle, naturellement dédiée à Saint Gengoult. Un joli but de promenade pour les habitants du Pays Naborien.