Le 3 novembre est une journée chère aux chasseurs. Qu’ils soient simplement traqueurs, chasseurs occasionnels ou veneurs chevronnés, tous célèbrent, ce jour-là, leur saint patron, à savoir Saint Hubert, un ancien évêque de Tongres et de Maastricht.
Bien qu’originaire de l’actuelle Belgique, Saint Hubert a très tôt bénéficié d’une incroyable popularité en Lorraine. Peut-être parce que notre région, avec ses forêts giboyeuses et ses plaines marécageuses, a toujours été un terrain favorable aux amateurs de cynégétique. Aussi, la Saint-Hubert est-elle devenue, dans notre région, une fête toute particulière, qui résonne souvent de quelques sonneries de cors ou autres aboiements de chiens.
Mais avant de présenter les traditions qui font du 3 novembre une fête pour les chasseurs, il importe de dire quelques mots de cet Hubert. D’après l’hagiographie officielle, il serait né en 657, probablement en Aquitaine. Dès sa plus tendre enfance, il se passionne pour la chasse, allant jusqu’à oublier tous ses autres devoirs. Il a coutume de partir chaque matin, avec son cor, son épieu et quelques chiens, et de ne revenir qu’à la nuit tombée, après avoir massacré des dizaines de loups, de sangliers, de chevreuils et d’oiseaux. Il chasse ainsi, chaque jour de l’année, passant son temps au plus profond des forêts, tuant sans pitié petit et gros gibier.
Et puis, un jour, il y a cette chasse, différente des autres. Une course effrénée qui a infusé dans son esprit un message nouveau. C’était un Vendredi Saint. Le jour où l’on commémore la mort du Christ. Hubert, sacrifiant aux intérêts spirituels, va chasser comme tous les jours. Il débusque un cerf, blanc et immense. Il le poursuit, longtemps, très longtemps. Et quand il est en face de lui, il s’aperçoit avec étonnement que l’animal porte entre ses bois une immense croix d’or. Cupide, Hubert veut encore s’emparer de l’animal. Mais une voix gronde, pareille au tonnerre. Elle le somme de se rendre auprès de l’évêque de Maastricht et de se repentir de ses fautes.
C’est ce qu’il fait. Afin d’amender ses péchés, Hubert va jusqu’à entrer dans les ordres. En l’an 705, sa piété est déjà si grande qu’il est désigné pour succéder à Saint Lambert sur le siège épiscopal de Tongres-Maastricht. Après vingt-deux ans d’un ministère sage et généreux, Hubert meurt, le 30 mai 727. Il est enseveli dans l’abbatiale Saint-Pierre de Liège, qu’il aurait fondée. Quelques années plus tard, le 3 novembre 743, son successeur l’évêque Saint Floribert canonise officiellement Saint Hubert. Les deux dates, celle de la mort et celle de la canonisation, expliquent que Saint Hubert soit fêté tantôt le 30 mai, dans le Nord de la France notamment, tantôt le 3 novembre en Belgique et aux Pays-Bas par exemple.
Transférées, vers 825, dans un petit village des Ardennes qui prendra le nom de Saint-Hubert, les reliques du pieux évêque attirent, très tôt, des pèlerins venus de toute la Lotharingie. De là, le culte à Saint Hubert se répand facilement. En Lorraine, l’histoire miraculeuse du cerf portant une croix d’or séduit l’aristocratie. Saint Hubert devient le patron des chasseurs, mais aussi des forestiers, des bûcherons et, d’une manière, générale, de tous ceux qui vivent et travaillent dans la forêt. Un village, situé non loin de Vigy en Moselle, porte d’ailleurs le nom du Saint évêque de Maastricht.
Populaire, Saint Hubert l’a été et le reste à plus d’un titre. En 1422, le cardinal Louis Ier de Bar décide de transformer l’Ordre du Lévrier, qu’il avait instauré cinq ans auparavant, en Ordre de Saint Hubert. Cet ordre de chevalerie, que l’on ne pouvait intégrer qu’avec cinq quartiers de noblesse, fut en quelque sorte une légion d’honneur à la sauce lorraine. Les membres de l’ordre se devaient de maintenir la paix dans les Duchés de Bar et de Lorraine. Ils devaient en outre entretenir ou faire entretenir au moins un lévrier et participer à la grande chasse à courre qui se tenait, chaque année, à la Saint-Hubert.
Aujourd’hui encore, la Saint-Hubert est une véritable institution pour les chasseurs de Lorraine. Chaque 3 novembre, ils ont coutume de célébrer leur saint patron au son des cors et en grande tenue. Les quelques équipages de vénerie qui existent dans notre région donnent à la fête une aura magnifique en faisant célébrer la traditionnelle messe de la Saint-Hubert. Pour l’occasion, ils revêtent leurs tenues écarlates et donnent du cor sous les voûtes des quelques vieilles églises, voire de la cathédrale de Metz ! La tradition exige également qu’un chien soit présenté devant l’autel au cours de la messe. Sonnerie de cors, chiens et tenues de vénerie forment une ambiance indescriptible, qui réjouit le cœur du chasseur et qui impressionne toujours. Un bel hommage rendu à « Monseigneur Saint Hubert », comme on disait jadis.