Lo vent d’Ardenne
Handeule les touilles
I d’poïlle nos ârbes
De zous foïllates.
~
Peus i d’vient frahh
Et i d’vient freud
I v’dièce lè pé
Et cas les as’.
~
Et lo sla qu’lut
Su les wèzons
Et su les touilles
Ne v’rèhhaufe pus.
~
Eune grand tristesse
Peūse tot èvau
És champs, és v’laīges
Et en nos-meinmes.
~
Ç’at que lè mowt
Vient de pèsser
Èvieu sè faux
Drèhau nos champs.
~
Dieuze, octōbe 1914
Eprès eune promwinnaîde su les champs d’bètèille de Biderstroff.
Après une promenade sur les champs de bataille de Biderstroff.
***
Voici la Toussaint
Le vent d’Ardenne
Balaie les chaumes
Il dépouille nos arbres
De leurs feuilles.
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Puis il devient frais
Et il devient froid
Il vous glace la peau
Et encore les os.
~
Et le Soleil qui luit
Sur les gazons
Et sur les chaumes
Ne vous réchauffe plus.
~
Une grande tristesse
Pèse tout partout
Dans les champs, les villages,
Et en nous-mêmes.
~
C’est que la mort
Vient de passer
Avec sa faux
En travers de nos champs.
~
Ce poème est extrait des Lamentaîtions ou chansons d’guère di soldaît maugré li (Lamentations ou chansons de guerre d’un soldat malgré lui) écrit et traduit du Lorrain roman par Joseph Frécaut, auteur natif du Saulnois. Daté d’octobre 1914, il fait partie de plusieurs poèmes écrits durant la guerre de 1914-1918.