Est-il besoin de présenter Saint Michel ? Tout le monde connaît plus ou moins cet archange céleste que la tradition représente sous les traits d’un éphèbe muni de grandes ailes et terrassant un monstrueux dragon.
Car oui, Saint Michel est un ange. Un archange même ! Contrairement aux ermites, martyres et autres évêques, dont nous avons déjà parlés, il est d’une nature supérieure. Presque divine. Son nom d’ailleurs, signifie en hébreu « celui qui ressemble à Dieu ». La Bible le cite à cinq reprises et les Pères de l’Eglise considèrent que c’est lui qui aurait arrêté le bras d’Abraham au moment où il s’apprêtait à sacrifier son fils Isaac. C’est aussi ce saint qui, dans le livre de l’Apocalypse, dirige les milices célestes dans l’ultime combat qu’elles livrent contre la Bête. C’est aussi lui qui aurait sauvé la commune de Saint-Mihiel, en Meuse, de sept méchantes fées.
Célébré le 29 septembre, Saint Michel a toujours joui d’une grande popularité en Lorraine, où pas moins d’une cinquantaine d’églises lui sont dédiées. La plus belle étant probablement la petite chapelle Saint-Michel d’Epinal qui, bien que privée, conserve des fresques remarquables.
La fête de l’archange a longtemps été une sorte de tournant dans le calendrier agricole. Les moissons étant engrangées, les vendanges étant en train de se faire ou allant seulement commencer, le 29 septembre était souvent la date à laquelle on commençait les semailles. Daniel Bontemps, dans son ouvrage intitulé Au temps de la soupe au lard, nous dit qu’au XVIIème siècle, les paysans de la Woëvre et du Pays Haut avaient coutume de labourer leurs champs le jour de la Saint-Michel. La pratique, jugée superstitieuse, semble s’être perdue après la révolution. Dans le Saulnois et au Pays des Etangs, on avait coutume de semer le seigle le jour de la Saint-Michel. En Pays Messin, la date était déjà trop avancée car un proverbe y prétendait que « celui qui sème à la Saint-Michel a déjà perdu une partie de la récolte ». Dans les Vosges, on disait « qu’à la Saint-Michel, la chaleur remonte au ciel ».
Plusieurs fontaines, dédiées à l’archange, étaient également réputées pour leurs vertus miraculeuses. Ainsi, à Tourailles, en Meuse, la fontaine Saint-Michel était fréquentée par les mères dont l’enfant était chétif. Elles y venaient avec un linge porté par le petit malade et déposaient le vêtement à la surface de l’eau. S’il surnageait, c’est que l’enfant serait guéri. Si, au contraire, le linge coulait, c’est que l’enfant, ne jouissant pas de la protection de l’archange, risquait la mort. La fontaine de Brouderdorff, en Moselle-Est, elle aussi dédiée à l’archange, passait également pour avoir des vertus thérapeutiques.
Temps des labours et des semailles, la fin de l’été correspondait donc à la fin de l’année agricole. Le foin remplissait les greniers. Les gerbes de blé attendaient d’être battues et le vin commençait à emplir bondes et tonneaux. Les jours se faisaient plus courts. Les brouillards plus persistants. L’automne arrivait et avec lui, d’autres fêtes et d’autres traditions.