Site emblématique de la ville de Pont-à-Mousson, la Place Duroc ne porta pas toujours ce nom. En effet, la Grand’Place, renommée Place de la révolution en 1792 puis Place d’Armes à la Restauration des Bourbons sur le trône de France, se vit attribuer au début du Second Empire le nom du Maréchal Duroc, né le 25 octobre 1772 à Pont-à-Mousson dans la Rue Saint-Laurent. Devenu l’ami et le confident de Napoléon Ier, il laissa ce dernier dans une grande tristesse lorsqu’il fut mortellement blessé par un boulet de canon lors de la campagne d’Allemagne en 1813.
La charte d’affranchissement signée le 21 avril 1261 par le Comte Thibaut II de Bar fonda la ville de Pont-à-Mousson, déplaçant l’activité marchande et commerciale du bourg qui s’était développée au pied de la forteresse de Mousson vers la nouvelle cité. La grande place, située à la jonction de deux axes routiers importants, devînt le lieu naturel accueillant foires, marchés, fêtes, mais aussi les troupes y campant en temps de guerre.
De forme triangulaire, elle fut bordée dès le XIIIème siècle de maisons à arcades. Selon la tradition, elle aurait été construite par des architectes venus des Flandres. De cette époque subsiste un arc gothique à l’angle formé avec la Rue Magot de Rogéville. Au XVIème siècle, la place prend un nouveau visage avec la construction d’hôtels dans le style Renaissance. La Maison des sept péchés capitaux, avec ses arcades à claveaux vermiculés, ses fenêtres à double croisillon, ses sept cariatides et ses deux baies géminées, ainsi que le Château d’Amour doté d’une échauguette, résidence du Duc de Lorraine avant d’être le siège de la Prévôté, en sont les plus beaux fleurons. Des fenêtres à meneaux surmontées de frontons brisés sont également observables sur d’autres façades. Mais également de belles clés d’arc qui s’affichent au centre d’arcades représentant des motifs végétaux surmontant deux rapaces qui tournent la tête dans un sens opposé.
Après les malheurs et les destructions de la Guerre de Trente ans, une nouvelle vague de constructions se développe au XVIIIème siècle. Les fenêtres s’ornent d’agrafes se présentant sous la forme de volutes entourant les moulures des arcades. Des motifs végétaux sont également sculptés. Le bâtiment le plus marquant de l’époque des Lumières est, bien sûr, l’Hôtel de Ville construit sous la direction de l’architecte lorrain Claude Mique entre 1786 et 1791. Sa façade à deux étages affiche au premier de belles fenêtres couronnées de frontons triangulaires qui s’ouvrent sur un balcon en saillie. La sculpture au centre du fronton central, qui serait l’œuvre de Johan Joseph Söntgen (Coesfeld 1719 – Nancy 1788), est une femme drapée représentant la monarchie française. Tenant dans une main le blason de la ville, elle se penche vers la paix. Deux statues coiffent le fronton à ses extrémités. L’une représente les Arts et la Justice, l’autre le Commerce. Au sommet, trône l’horloge encadrée par deux aigles, la Croix de Lorraine en sautoir.
Plusieurs façades de maisons subirent encore des modifications au XIXème siècle. Et le côté Nord fut même carrément reconstruit. En effet, il fut atteint par deux bombes qui l’incendièrent complètement lors du bombardement américain qui débuta à 23h00 le 3 septembre 1944. Pour cette raison, les arcades ne sont pas d’origine de ce côté mais ont été reconstruites, quelques années plus tard, en pierres de taille, dans le respect du style de l’ensemble de la place, mais sans motifs sculptés.
Lieu de vie, de rencontres et d’échanges, la Grand’Place fut rapidement dotée d’un puits alimenté par l’eau d’une source provenant du village voisin de Montauville. A celui-ci succéda une fontaine remaniée à plusieurs reprises avant d’être démolie en 1867. Trois bornes à eau la remplacèrent. Après l’édification d’un éphémère kiosque, l’idée de reconstruire une nouvelle fontaine fit son chemin. Elle fut érigée en 1931 et rend hommage aux ambulanciers volontaires américains qui servirent dans l’Est de la France de 1915 à 1917.
De nos jours, la Place Duroc est encore entourée de commerces et de services. La circulation à ses abords est toujours très importante, distillant le son bruyant des automobiles et leurs gaz d’échappement. Mais ceci ne rebute pas les Mussipontains et les touristes de passage qui s’arrêtent volontiers quelques instants ou un bon moment pour se rafraîchir et déguster quelques pâtisseries lors de la belle saison à l’une des terrasses de cafés. Qu’en penserait Edouard Cabaret, Maire de Pont-à-Mousson de 1923 à 1932, dont le conseil municipal fut l’initiateur de la reconstruction de la fontaine ?