Il faut, de temps en temps, s’arrêter un petit peu. Se poser et prendre le temps de regarder les choses. Les grandes et les menues choses. Les détails. Car ils ont mille choses à transmettre. Par exemple, le pignon ci-dessous, me direz-vous, est tout ce qu’il y a de plus banal. Quelques pierres en sortent, avec une certaine régularité. On les appelle des « boutisses ». Les maçons les disposaient dans le mur, afin de le stabiliser. Elles traversent toute l’épaisseur du mur et le consolident. Le renforcent, en quelque sorte. Les pierres boutisses servaient également de « prises » au cas où une nouvelle maison venait à se construire en mitoyenneté de la maison déjà bâtie.
Outre ces pierres qui jaillissent du pignon de la maison, il y a la toiture. Laquelle a conservé ses tuiles romaines, ou canal, qui se présentent sous la forme d’un demi-cône tronqué et coupé dans sa longueur. Cette tuile est un héritage direct de l’imbrex des Romains. Ces derniers recouvraient en effet leurs toits, dans l’Antiquité, de tegulae (au singulier tegula), sortes de tuiles plates recouvertes, sur les jointures, de tuiles creuses appelées imbrices (imbrex au singulier). En Lorraine, on a conservé cet imbrex et la toiture traditionnelle présente cette tuile, disposée coins vers le haut, tandis que d’autres tuiles de même forme viennent recouvrir ces mêmes coins et assurer ainsi l’étanchéité. Cela donne à notre contrée un côté provençal, méridional. Car en Alsace, en Champagne ou en Bourgogne, on use plutôt de petites tuiles plates, parfois dites en « queue de castor ».
Des caractéristiques, en apparence toutes anodines, mais qui nous en disent long sur l’habitat traditionnel lorrain. J’oubliais de préciser que la demeure en question se trouve à Haucourt-la-Rigole, aux confins de la Woëvre et du Pays-Haut.