Dans la Lorraine d’autrefois, rurale et viticole, Saint Urbain occupait une place toute particulière. D’aucuns n’hésitaient pas, d’ailleurs, à faire de lui le dernier Saint de Glace. Et les vignerons qui, du Toulois à la Moselle, craignaient les gelées tardives, n’hésitaient pas à s’en remettre à cet ancien pape pour s’attirer d’abondantes récoltes.
Urbain, pourtant, n’a rien de Lorrain. Il fut appelé à monter sur le trône de Saint Pierre en 222, afin de succéder au Pape Calixte Ier qui venait de mourir défenestré. Mal connu, son pontificat ne dura que huit ans. Urbain mourut en effet le 23 mai 230. Il serait enterré dans les catacombes de Saint-Calixte, à Rome. C’est le transfert de ses reliques par le Pape Nicolas Ier qui, en 862, va faire d’Urbain un saint estimé des vignerons. Cette année-là en effet, quelques ossements du saint pontife sont confiés au Roi de France Charles le Chauve. Lequel roi choisit d’offrir les précieuses reliques à l’Eglise d’Auxerre, charmante bourgade située au cœur d’un vignoble déjà réputé à l’époque. A partir de là, Saint Urbain s’impose vite, avec Saint Vincent, comme le patron des vendangeurs. Il jouit notamment d’une grande popularité dans le Saint Empire et donc en Lorraine. Il faut dire aussi que, fêté localement le 25 mai, le saint paraît présider à la floraison de la vigne. Une floraison qui, d’ordinaire, précède d’une centaine de jours les traditionnelles vendanges.
Le culte que les vignerons lorrains vouaient à Saint Urbain était au moins aussi important que celui que l’on adressait à Saint Vincent, dont on a déjà dit qu’il était, lui aussi, patron des vignes et des vendangeurs. Dans son Dictionnaire des traditions populaires messines, Westphalen nous rapporte qu’une vieille coutume populaire voulait que s’il faisait beau à la Saint-Urbain, on portât la statue du saint en procession. En revanche, s’il gelait le jour-là, la statue passait une nuit dans un buisson d’orties. Le même auteur témoigne, à travers de quelques dictons populaires, de la ferveur du culte qui était autrefois voué à Saint Urbain en Lorraine. On disait par exemple : « Quand il fait sec à la Saint-Urbain, on aura du bon vin ». Ou bien : « Quand la Saint-Urbain est passée, le vigneron est rassuré ». Ou encore : « A la Saint-Urbain, s’il fait beau, chacun prépare ses tonneaux ». Autant de proverbes qui font bien de ce vieux pape un patron de la vigne et du bon vin !
