Le blason de Châtenois, dans les Vosges, se décrit ainsi en héraldique : de gueules aux trois têtes de loup en rencontre arrachées d’or. Il s’agirait des armes d’une famille Châtenois, d’ancienne chevalerie, éteinte depuis fort longtemps déjà au XVIIème siècle. Mais selon la légende, ce blason renverrait à Thierry le Vaillant, l’un des premiers Ducs de Lorraine.
Tout commence en 1095 avec l’Appel de Clermont. La première croisade est lancée, menée par différents barons, dont Godefroy de Bouillon, qui est le premier à entrer dans Jérusalem, trois ans plus tard. Thierry le Vaillant, fils de Gérard de Châtenois, fut également le contemporain de l’Appel de Clermont. Le Duc envisagea de partir en croisade, mais se fit relever de son vœu par le légat pontifical à cause de son état de santé. Il engagea alors les chevaliers lorrains à participer à l’expédition.
Adalbert de Metz, le frère aîné de Gérard de Châtenois, devenu Comte de Metz à la mort de son père, fut investi du Duché de Haute-Lotharingie au début de l’an 1047 par l’Empereur Henri III, qui venait de le confisquer à Godefroid d’Ardenne, également appelé Godefroid le Barbu. Celui-ci ne s’avoua pas vaincu et tua Adalbert dans une bataille près de Thuin, le 11 novembre 1048. Furieux, Henri III donna alors le Duché au frère d’Adalbert, Gérard de Châtenois. Godefroid d’Ardenne, Duc de Basse-Lotharingie, eut de son premier mariage une fille, à savoir la bienheureuse Ide ou Ida de Boulogne, parfois également nommée Ide de Lorraine, née vers 1040 en Ardennes et morte le 13 avril 1113. Eduquée à l’abbaye de Munsterbilzen, celle-ci épouse à 17 ans, vers 1056, Eustache II, Comte de Boulogne. De ce couple sont nés trois enfants : Eustache III, Comte de Boulogne, Godefroy de Bouillon, Duc de Basse-Lotharingie, puis avoué du Saint-Sépulcre, et Baudouin Ier, Comte d’Edesse puis Roi de Jérusalem. Godefroy de Bouillon est donc le petit fils de Godefroid d’Ardenne, celui qui tua l’oncle de Thierry le Vaillant et qui fit prisonnier son père, Gérard de Châtenois, pendant un an. L’entente entre Thierry le Vaillant et Godefroy de Bouillon ne devait pas être très cordiale, ce qui pourrait expliquer en réalité la vraie raison de son absence à la croisade, d’autant plus que le titre porté par Thierry le Vaillant était revendiqué par le passé par la famille de Godefroy.
Mais revenons à notre histoire de blason et des trois loups. A l’été 1099, la ville de Jérusalem fut libérée. Mais voilà, les soldats se disputèrent la couronne royale. Qui devait devenir Roi de Jérusalem ? C’est alors que Godefroy de Bouillon, désireux d’informer le pape de la victoire chrétienne, chercha l’encre et la plume nécessaires pour écrire sur le parchemin qu’on venait de lui préparer. Il banda son arc et vint à abattre, d’une seule et même flèche, trois petits aiglons blancs, sans becs ni griffes et qu’on connaissait dans la région sous le nom d’Alérions. Il trempa l’une des plumes dans le sang de ces volatiles et écrivit au pape. Mais à peine avait-il finit de rédiger la missive pontificale que les chevaliers vinrent le trouver pour lui proposer de devenir Roi de Jérusalem. « Mes seigneurs, répondit le noble Duc, je ne peux ceindre une couronne d’or là où le Christ dut porter une couronne d’épines ». D’après la légende, les Ducs de Lorraine, après que Godefroy de Bouillon eut accompli ce petit miracle, décidèrent d’adopter les Alérions comme blason.
Thierry le Vaillant, apprenant les exploits de Godefroy, et surement contrarié, décida pour se changer les idées de partir à la chasse aux loups. Dans la forêt castinienne, il aurait aussi réalisé un miracle en tuant avec une seule flèche trois loups qui tentaient de lui échapper. Les trois loups morts, ce furent bientôt tous les autres loups qui décidèrent de quitter nos forêts pour ne plus à revoir le terrible chasseur. Comprenant son erreur, Thierry le Vaillant, pour se faire pardonner sa cruauté, adoptât l’emblème des trois loups pour la ville de Châtenois. Aujourd’hui cette histoire est oubliée. Les loups sont revenus.