Les cartes anciennes sont fascinantes. Peintes et calligraphiées avec minutie, elles nous mènent à travers des mondes surprenants, parfois imaginaires, toujours très poétiques. Des cartes médiévales qui placent Jérusalem au centre d’un monde dans lequel figurent encore le Jardin d’Eden et le mystérieux royaume du prêtre Jean aux cartes de Cassini, qui mentionnent aussi des villages parfois disparus. Truffées de dragons et de sirènes ou encore dessinées sur des mappemondes où fleurissent des roses des vents multicolores, les cartes anciennes ont, vraiment, de quoi nous émerveiller.
Celle que je souhaite vous présenter ci-dessous a été dressée vers 1578 par Thierry Alix, Président de la Chambre des Comptes du Duc Charles III de Lorraine. Celui-ci avait été mandaté par le pouvoir ducal pour dresser une carte des sommets vosgiens. A cette époque en effet, des litiges apparaissent, au sujet des Hautes-Chaumes, entre le Duc de Lorraine et l’abbaye de Munster, en Alsace. Ces pâturages d’altitude, dotés d’une herbe aussi grasse que généreuse, représente un territoire qu’il est d’autant plus nécessaire de maîtriser que l’activité agro-pastorale est l’une des rares qui puisse être pratiquée dans cette partie du duché.
Thierry Alix va donc s’appliquer à cartographier cet espace. Ou plutôt, à le représenter en perspective cavalière. Le regard, ici, est tourné vers l’Orient. On remarque, à gauche du document, les lacs de Gérardmer, Longemer et Retournemer. A droite en revanche, c’est le vallon de La Bresse qui se découvre. Derrière la ligne de crête, la mention Val de Monstier indique bien la Vallée de Munster, que les Alsaciens appellent Menscherthal. Le Hohneck trône au milieu de tout cela, tel un géant dont la tête se perdrait dans les nuages. Une carte, qu’il faut prendre le temps de regarder, d’observer. De scruter.