Pour le dimanche de Pâques, je vous propose un petit texte en Patois de Borville, près de Bayon. Dans mon village natal d’Einvaux, situé à six kilomètres de là, il y a des différences de conjugaisons. Par exemple, « j’tais, j’taizôr » à Borville et « j’tôs, j’tôzâr » à Einvaux.
Le Patois de Borville est en effet déjà bien influencé par le Patois de Rambervillers. A Einvaux, d’après l’Atlas Linguistique, on trouve aussi des formes en « -aizôr », comme à Moriviller. Ces deux villages sont d’ailleurs des villages dit de transition linguistique.
Dans le texte sur Pâques en Patois de Borville ci-dessous, j’ai mis entre parenthèses les formes du Patois d’Einvaux.
Les kieuches (keuches) pèkînt po Rome lo Jieudi Saint è lè mosse lo mètîn, peus ’l ont r’veni lo Sam’di Saint è lè mosse aussi di mètîn et peus ’l appoukînt des ieu(f)s (û(f)s) qu’on samait das les jèguîns d’în coté et ca d’l’aute po qu’les afants les qwèrinhhent.
È lè S’maine Sainte, y’èvait twohh (èvôt trôs) jonêyes qu’on f’yait (f’yôt) des offices, on ecc’mmaçait lo Jieudi Saint lo swô (ecc’mmaçôt lo Jûdi Saint lo sô) et peus èprès l’office, on touait (touôt) Pilate èvo nos brouants et peus les twôs (trôs) jonêyes pareilles. Lo mercredi, tot chèkîn allait (allôt) confesser pou faire ses Pâques lo jieudi (jûdi) lo mètîn è lè mosse, et peus, mè fwè, lo venr’di, y’èvait (èvôt) ca ène office aussi lo mètîn et au swô (sô), et peus lo sam’di, on f’yait l’ôve bènite (f’yôt l’âwe bènite) lo mètîn è lè mosse et peus, c’ètait (ç’tôt) fait lè S’maine Sainte, i n’èvait pwèt (èvôt point) d’office lo swô. Lo Venr’di Saint è twôs (trôs) (h)oûres, y’èvait (èvôt) lo ch’mîn d’lè creûx, lo swô, y’èvait (èvôt) ène office di Venr’di Saint.
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Les cloches partaient pour Rome le Jeudi Saint à la messe le matin, puis elles revenaient le Samedi Saint à la messe aussi du matin et puis elles apportaient des œufs qu’on semait dans les jardins d’un côté et de l’autre pour que les enfants les cherchent.
A la Semaine Sainte, il y avait trois jours où l’on faisait les offices. On commençait le Jeudi Saint le soir et puis après l’office, on tuait Pilate avec nos crécelles, et puis les trois jours pareils. Le mercredi, tout le monde allait se confesser pour faire ses Pâques le jeudi matin à la messe, et puis, ma foi, le vendredi, il y avait encore un office aussi le matin et le soir, et puis le samedi. On faisait l’eau bénite le matin à la messe et puis c’était fini la Semaine Sainte. Il n’y avait pas d’office le soir. Le Vendredi Saint à trois heures, il y avait le chemin de croix, le soir, il y avait un office du Vendredi Saint.
Traduction du Patois de Borville.
La fête chrétienne de Pâques repose sur les anciennes célébrations de la déesse celtique Eostre, qui trouvent elles-mêmes leur origine chez la déesse germanique Ostara. Le nom Ostara dérive d’ailleurs d’Ost, l’Est, d’où se lève le Soleil, et fait ainsi référence à l’aube et au renouvellement de la vie. En Pays Messin, Ostara était initialement célébrée à l’équinoxe de printemps. On peignait alors des œufs, symboles de renaissance, avec des couleurs vives, qui étaient utilisés lors de rituels avant d’être mangés. Selon la tradition, la déesse Ostara sortait de son sommeil pour venir envelopper la Terre de fertilité. C’était alors le temps de semer dans les champs. A Pâques, la maison était entièrement nettoyée. Un feu nouveau brûlait dans l’âtre depuis la veille. L’installation du ménage dans sa demeure renouvelée et dépoussiéré était alors fêtée lors du dîner. On raconte également qu’il fallait goûter sept fois le jour de Pâques. En Pays Messin, il était d’usage de porter des vêtements neufs. Les anciens disaient enfin que les sorciers et les sorcières qui portaient un œuf de Pâques étaient voués à une mort prochaine. C’est la raison pour laquelle on offrait un œuf de Pâques à toutes celles et ceux que l’on soupçonnait de sorcellerie.