Dans la Plaine de la Woëvre vivait, il y a quelques siècles de cela, un très puissant seigneur, connu dans la contrée sous le nom de Philippe de Florenges. Il habitait, à Buzy, dans un somptueux château, dans lequel il prenait plaisir à donner d’opulents banquets et à organiser des joutes et tournois mémorables.
Si ces occupations lui permettaient de s’illustrer auprès de ses pairs, force était de constater que c’était à la chasse que Philippe de Florenges préférait encore passer son temps. En toute saison en effet, le seigneur de Buzy courait les sombres forêts, les inquiétants marais, les landes et les friches. Il traquait l’aurochs, l’ours, le loup et le renard, le cerf et le sanglier. Jamais lassé par cette sauvage passion, il passait des journées entières à cheval, à poursuivre un gibier aussi fougueux que féroce, au grand dam de son épouse, la belle et tendre Yolande.
Cette dernière, qui se désespérait de voir son mari préférer la chasse aux choses de l’esprit, en vint un jour à lui demander une faveur. Elle le pria le en effet de lui faire une promesse. Une promesse toute simple : celle de ne pas aller chasser le jour de Pâques. Philippe de Florenges promit à sa belle de rester au château et d’assister à la sainte messe de la résurrection. Les choses en restèrent là. Et chacun s’en alla heureux.
Or, le matin de Pâques, un étrange personnage, tout de rouge vêtu, se présenta dans la cour du château de Buzy et demanda à voir le seigneur des lieux. Il lui assura qu’un cerf immense, coiffé de grands bois dorés, errait dans les forêts qui couronnent le petit village de Parfondrupt. Pour appuyer ses dires, le petit homme jeta un morceau d’andouiller qui était effectivement tout en or !
En voyant et entendant ceci, Philippe de Florenges ordonna à ses palefreniers de faire seller son cheval. Il prit son épieu, son cor de chasse, fit préparer la meute et s’élança, à bride abattue, aux côtés du petit homme rouge, à la quête du cerf magnifique.
Parjure et coupable de ne pas avoir su tenir promesse, Philippe de Florenges ne revint jamais en son beau château. Il s’obstina à poursuivre un cerf qui n’existait pas. Un rêve, un ban de brume né de l’imagination d’un personnage qui pourrait bien être le diable. On raconte cependant que, par certaines nuits de pleine Lune, on entendrait, quand souffle le vent du Nord, le bruit d’une chasse furieuse, faite d’aboiements de chiens et de longs hurlements de cors. Ce serait la haute chasse de Buzy, qu’il vaudrait mieux, à ce qu’on m’a dit, ne jamais déranger …