Après avoir terminé fin juin un périple de 3 200 km en Nouvelle Zélande, Sofiane Boubahlouli, 32 ans, repart pour une nouvelle « longue marche », plus spirituelle. De Boulay, où il a grandi, il rejoindra dans six mois Alger, la ville d’origine de son père, en passant par Saint-Jacques-de-Compostelle, l’Espagne, le Portugal et le Maroc. 5 000 km pour découvrir son pays, ses origines et ses racines. Départ : ce dimanche 24 septembre.
« Laisse tes rêves devenir réalité », lui avait-on dit. En janvier 2015, Sofiane entame une nouvelle vie. Après avoir été cuisinier, il obtient en alternance un BTS et une licence en marketing. En 2013, il devient ingénieur commercial chez Hilti. Un premier rêve se réalise. La mort de son frère, un accident et une rupture amoureuse vont accélérer sa métamorphose. Il part en Australie où sa sœur a émigré. Vivant de petits boulots, durant deux ans, il va réaliser son deuxième rêve fait de voyages, de randonnées et de découvertes : le désert australien en 4×4 sur plus de 40 000 km, le Japon et l’Indonésie. Avec le Te Araroa, quatrième plus long trail du monde qui traverse la Nouvelle-Zélande du Sud au Nord, sur 3 200 km, un nouveau challenge s’offre à lui.
Un nouveau défi aux antipodes
Est-ce une remise en question ou une recherche de soi-même ? Toujours est-il qu’il prend le départ du trail le plus difficile du monde le 21 janvier 2017 avec 700 autres concurrents. Montagnes, plages, forêts tropicales, villes et volcans, le parcours est un mélange de petites randonnées (walking track), de grandes randonnées (hicking track) et de sentiers non tracés au balisage espacé, voire inexistant (tramping). Chute en montagne avec sauvetage en hélicoptère, fracture de fatigue, infection d’un pied, hypothermie, culbute dans une rivière en crue, ces 3 200 km d’aventure n’ont pas été de tout repos. « Se retrouver seul, loin de ses repères, est une aventure intérieure. Cette longue marche m’a changé et rendu heureux. Je me suis découvert. Cela a été une thérapie ». A l’arrivée, le 30 juin, Sofiane avait déjà Saint Jacques-de-Compostelle et Alger en tête.
Une « longue marche » plus spirituelle
Le film The Way. La route ensemble d’Emilio Estevez a été un déclic : passer par les chemins de Compostelle sur la route du Portugal et du Maroc. « Je n’ai aucune appréhension avant Gibraltar. Je ne suis jamais allé au Maroc ni en Algérie. Je ne parle pas l’arabe. Je ne suis pas croyant. Je ne suis fermé à aucune religion mais je crois en la spiritualité. Boulay-Alger à pied, c’est naturel. Est-ce de la folie ou une autre fuite ? Cela fait partie de mon chemin de vie pour construire le nouveau Sofiane 2.0. ». Son père Mourad, musicien connu sous le nom d’El Yed, et sa mère l’encouragent : « Si tu es heureux comme ça, fonce ! ». Pour cette nouvelle aventure pédestre, Sofiane va marcher pour l’association Seuil, créée voici quinze ans, qui fait marcher de jeunes délinquants. 95 % de ceux qui ont marché avec Seuil reviennent porteurs d’un projet menant à la réinsertion.
Deux mois de préparation
Le retour de Sofiane à Boulay a été dur car réintégrer la civilisation est compliqué, lui qui n’a eu aucune contrainte, ni grands besoins. Il prépare son nouveau raid pédestre et s’entretient : deux heures de marche rapide par jour et 15-20 km de course tous les deux jours, lui qui n’avait jamais fait de sport avant 2013. Ses préoccupations d’avant départ sont très terre à terre : chasse aux sponsors pour un budget de 1 800 euros, visa, achat d’une caméra GoPro et d’un téléphone, vérification du GPS et de la balise de sécurité. Tout au long des 5 000 km, ce sera dix à douze heures de marche par jour, entre 30 et 50 km de 7 heures à 17 heures. Un sac de 8 à 10 kg pour la tente, le sac de couchage, la trousse de secours réduite au minimum et du matériel ultraléger. « Les trois premières semaines sont les plus difficiles psychologiquement et physiquement. Je marche en short avec mes deux bâtons, indispensables. Une paire de chaussures me fait 1 200 km. Il faut boire beaucoup pour éviter les crampes. Quant à la nourriture, il faut privilégier les protéines : fruits secs, beurre de cacahuètes, barres énergisantes. 5 000 calories par jour ». De ce défi pédestre, Sofiane fera un reportage sur le thème « croire en la bonté de l’humain » et on pourra le suivre sur sa page Facebook et sa chaîne Youtube.