Contrôlée depuis 2005 par les fonds américains Starwood Capital Group et L Catterton après le rachat de la Société du Louvre à la famille Taittinger, la Manufacture de Baccarat, créée il y a plus de 250 ans en Lorraine, a été cédé en juin dernier à un fonds d’investissement chinois baptisé Fortune Fountain Capital (FFC). FFC était entré en négociations exclusives avec les fonds américains spécialisés dans l’immobilier pour acquérir leur participation de 88,8 % dans Baccarat. Au total, l’opération s’est montée à 164 millions d’euros.
Créé en 1764 en Lorraine, la société Baccarat est aujourd’hui l’un des leaders mondiaux de la production en cristal haut de gamme. La cristallerie, qui emploie près de 500 personnes, fabrique essentiellement des articles de table, des lustres, des bijoux et des objets de décorations de luxe. Après une perte en 2015, la société a de nouveau dégagé des bénéfices en 2016, à hauteur de 2,2 millions d’euros, pour un chiffre d’affaires de 148 millions d’euros.
Selon Coco Chu, la nouvelle patronne chinoise de la manufacture et Présidente-Directrice Générale de FFC, la production et l’emploi seront maintenus à Baccarat. Pour la richissime jeune femme d’une trentaine d’années, cela n’aurait en effet aucun sens de délocaliser la production puisque l’âme, le savoir-faire et l’excellence de l’entreprise se trouvent à Baccarat. Afin de réveiller la belle manufacture endormie, elle a d’ailleurs approuvé un plan de développement qui devrait se traduire à court terme par un investissement de plus de vingt millions d’euros, puis plus tard par un autre de cinquante millions d’euros. FFC entend ainsi accélérer le déploiement de Baccarat à l’international, notamment en Asie et au Moyen-Orient tout en maintenant sa croissance sur les marchés des pays les plus développés. La holding chinoise a en effet dans son carnet d’adresses de richissimes clients à qui elle propose des services financiers haut de gamme. Elle compte également de puissants réseaux d’influence qui devraient permettre à Baccarat de densifier son maillage de boutiques à travers le monde, en particulier là où la marque est peu présente actuellement.
La cristallerie de Baccarat a dernièrement été reprise par un consortium de cinq fonds d’investissement internationaux, dont le principal est situé à Hong Kong. Les fonds Tor Investment Management, Sammasan Capital, Dolphin Capital, CEOF Holdings et Corbin Opportunity détiennent en effet désormais 97,1 % du capital de la manufacture lorraine. Cette prise de participation s’inscrit dans le cadre d’un accord de crédit signé entre ces différents fonds et l’ancien actionnaire majoritaire de la cristallerie de Baccarat, à savoir la société Fortune Legend Limited (FLL), filiale du groupe chinois Fortune Fountain Capital (FCC) qui appartient à la femme d’affaires Coco Chu. FFC avait racheté la cristallerie de luxe en juin 2017 aux fonds d’investissement américains Starwood Capital Group et L Catterton pour un montant compris entre 164 et 185 millions d’euros. Afin de réaliser cette opération, FCC avait emprunté 50 % du montant de la transaction auprès de deux fonds d’investissement basés à Hong Kong, à savoir TOR Investment Management et Sammasan Capital. Le groupe chinois, qui détenait alors 88,8 % des titres de Baccarat, s’était engagé à investir massivement dans la manufacture. Mais TOR Investment Management et Sammasan Capital soupçonnèrent assez rapidement FCC de siphonner la trésorerie de Baccarat. Or, les titres détenus par FLL avaient été mis en gage comme garantie dans le contrat d’emprunt. Craignant de pas être remboursés, les créanciers de FCC ont alors décidé de mettre la main sur la cristallerie. Dans le but de protéger la manufacture lorraine du conflit opposant sa maison mère chinoise aux fonds d’investissements hongkongais, le Tribunal de Commerce de Nancy avait désigné en septembre dernier deux administrateurs provisoires pour gérer les affaires courantes de l’entreprise qui compte 1 200 salariés, dont 600 en Lorraine. Les nouveaux propriétaires de la cristallerie n’excluent d’ailleurs pas une réorganisation du groupe Baccarat, voire une cession. Pendant ce temps, la manufacture a réalisé des ventes largement supérieures aux prévisions, malgré la pandémie de Covid-19, en raison notamment des bonnes performances de sa filiale japonaise qui a contribué à plus d’un tiers de son chiffre d’affaires en 2020.